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Titre du blog : dessins et poèmes pour les enfants
Auteur : rirepourlesenfants
Date de création : 05-07-2008
 
posté le 08-09-2009 à 00:03:49

3e Opus de la série "Les Chevaliers certifiés" ; aujourd'hui, le "Chevalier sans tune " !

le Chevalier sans tune

 

Il était une fois, un Chevalier dont le courage n’avait d’égal que sa pauvreté. Son nom ? Le « Chevalier sans tune » !

En ces temps lointains, la crise économique frappe durement les riches. Quant aux pauvres, ils s'en moquent complètement ; ils n'ont rien ! Arghhh ! Les égoïstes ! Bref… Le Chevalier sans tune habite une sorte de vieux château légué par une tante lointaine, tout deux en ruines. Le Chevalier sans tune n’a, comme son nom l’indique, pas un radis. Sa situation financière est catastrophique et ne lui permet en aucune manière de colmater les trous, réparer les plafonds et autres murs qui s’écroulent aux quatre coins du château. Pire, tous les objets ayant une quelconque valeur, sont vendus régulièrement, quand ils n’ont pas été dérobés avant... Bref, question château, on a déjà vu mieux !

Par une belle et chaude matinée estivale, le Chef des gardes apparaît à la porte du « Chevalier sans tune », plus précisément dans son encadrement, puisqu’elle a été vendue le mois dernier. Toujours paré des meilleures intentions, pour ne pas déplaire au Chevalier sans tune, le Chef des gardes fait mine de frapper à la porte et crie :

« Toc ! Toc ! Toc ! Chevalier sans tune, c’est moi, le Chef des gardes ! Je frappe à ta porte, écoutes, Toc ! Toc ! ! Réveilles-toi! Le terrible Chevalier noir se tient devant le château ! Il n’a de cesse de t’injurier et il te provoque en duel. Fais vite, Chevalier sans tune, le temps presse et les moqueries pleuvent ! Toc ! Toc ! Toc ! »

« Je t’en conjure, ne cogne pas si fort à ma porte, tu risques de la briser, sans parler de mes pauvres tympans ! Et cesses ces beuglements, je ne suis pas sourd ! J’arrive immédiatement, mon brave Chef des gardes ! Que l’on prépare prestement mon armure, qu’on aiguise mes armes, qu’on selle mon destrier ! Et qu’on se le dise, le Chevalier noir est… déjà mort ! ah ! ah ! ah ! ».

Le Chef des gardes s’étonne :

« Désolé, Chevalier sans tune, mais ne te rappelles-tu pas que tes armure, armes et cheval, ont été vendus il y a 1 mois de cela ! ».

« Ah, j’oubliais ce détail… Qu’importe, prêtes-moi donc ce beau  poignard que tu portes à la ceinture, il fera l’affaire ! »

« Je ne le puis pas, mon maître, car ce ne serait pas un bon service à te rendre ! J’aurais été pourtant fier de te prêter une arme qui puisse contribuer à remporter une brillante victoire sur le Chevalier noir ! Mais ce que tu sembles prendre pour un poignard, n’est autre qu’un vieux croûton de pain ! »

« Qu’à cela ne tienne, conserves ta pitance ! Je ne saurais attendre d’avantage : vite, équipez ma monture ! »

« Chevalier sans tune, il y a de nouveau un petit problème… »

« Quoi encore ? »

« Chevalier sans tune, nous avons mangé le dernier cheval du château la semaine dernière. Si ma mémoire est bonne, il s’agissait du tien.

« Je fais fi de ces anecdotes dénuées de tout sens et du moindre intérêt… J’aime la difficulté ! Ah ! ah ! ah ! Il fait bon rire ! Suis-moi et prends exemple sur le Chevalier sans tune que tu as le privilège de côtoyer et de servir, brave Chef des gardes ! »

Nu comme un vers, le Chevalier sans tune sort de sa chambre, descend l’escalier et apparaît dans la Cour d’honneur, en tenue d’Adam, sous le regard à peine étonné des habitantes du château, qui ne sont, en général, guère mieux lotis. Le Chef des gardes se place devant le Chevalier sans tune, l’air sévère :

« Maître, dis-moi, que dois-je faire présentement ? Je n’ai rien à te donner pour combattre le Chevalier noir ! ».

« Chef des gardes, que tu es défaitiste ! Il y a des solutions à tout, même des mauvaises… Je combattrai donc mains et pieds nus, en utilisant la technique du « Fun Moï ounepatate » qui n’a plus aucun secret pour moi. Sais-tu que cette discipline asiatique - enseignée uniquement le 1er lundi des années bissextiles, au sommet du Kilimandjaro -, est sans équivalent dans le monde ? Non, tu ne le sais point… Je sens que tu ignores tout du « Fun Moi ounepatateé »… Comment peux-tu vivre ainsi… Monde cruel… Chef des gardes, écoutes et retiens : le secret de cette discipline séculaire, réside dans l’absorption par le Maître-combattant, en l’occurrence moi, de l’énergie déployée par l’adversaire pour mieux la retourner, cette fois décuplée, contre lui. Pratiquement, le « Fun Moi ounepatateur » permet d’improviser une sorte de chorégraphie qui doit, théoriquement, placé le rival sous son total contrôle mental. Quelques secondes suffisent ! Maintenant que tu es dans la confidence, laisses-moi une minute seul, j’ai à faire…».

Sur ces mots, le Chevalier sans tune tombe à genoux, les bras écartés les yeux perdus dans les cieux… Il scrute le ciel pour interroger quelque augure. Son visage est fermé, comme en souffrance… Soudain, un large sourire vient illuminer sa face. Le Chevalier sans tune se relève immédiatement. Le Chef des gardes, perplexe, s’approche :

« Chevalier sans tune, j’ai assisté à ta préparation. Tu semblais souffrir puis, d’un seul coup, ton visage est devenu radieux… sans doute le Fun Moi ounepatate ? »

« Que me racontes-tu là, Chef des gardes ? Une terrible crampe m’a pris les deux jambes et contraint à tomber à genoux. Une fois la douleur partie, j’ai été mieux de suite et voilà tout ! Maintenant, je suis prêt, alors… ». Soudain, le Chevalier sans tune bombe le torse et lance fièrement :

« Ouvrez la porte ! Qu’on lève le pont-levis ! Mort au Chevalier noir ! ».

Le Chef des gardes intervient de nouveau :
« Maître ! Maître ! Malheureusement, nous avons été contraints, pas plus tard qu’hier matin, à nous séparer contre quelques deniers, de la porte d’entrée du château ».
« Autant pour moi, j’aurais dû m’en douter… Mais j’aperçois là-bas, une silhouette familière, massive et arrogante : c’est bien celle du Chevalier noir… De ce pas, j’entends répondre à ses pitoyables provocations de la  manière la plus ferme : regardez-moi bien et savourez la première et dernière défaite du Chevalier noir ! Ah ! Ah ! Celui qui ne connaît pas le Fun Moi ounepatate ! Ah ! Ah ! Qu’il fait bon se gausser ainsi ! Allez, écartez-vous ! Poussez-vous et que les âmes sensibles détournent le regard : ça va saigner ! ».

« Méfies-toi » prévient le Chef des gardes, «  on a vendu également le pont-levis ! ».

« Merci pour ce précieux renseignement, fidèle parmi mes fidèles ! ».

Poussant alors un étrange cri ressemblant davantage au hululement de la chouette qu’à l’exultation émanant d’un guerrier sanguinaire, le Chevalier sans tune se met à courir à fond, toujours tout nu. Il traverse la cour sous les « Hourra ! » de l’assistance, passe par la sortie béante, effectue un long saut par-dessus le large fossé ceinturant le château et se retrouve juste devant le Chevalier noir. Là, devant le terrible adversaire demeuré impassible, le Chevalier sans tune débute une danse étrange. Tout en fixant son rival droit dans les yeux, il commence à se mouvoir langoureusement, très lentement. Soudain, le rythme s’accélère : il saute sur place, se roule par terre, plonge à gauche, à droite, multiplie les grimaces et enchaîne les simulacres de coups de pied et de poing. Sans que rien ne le laisse présager, il se fige. Il constate alors que le Chevalier noir n’a pas bougé d’un centimètre. Etonné, le Chevalier sans tune se retourne et le voilà reparti dans l’autre sens. De nouveau, il enjambe le fossé, pénètre dans le château, fais le tour à toute vitesse de la Cour d’honneur, repasse en levant haut les bras devant son public qui l’acclame chaudement. Il regagne la sortie, saute encore une fois par-dessus le fossé pour se présenter encore une fois devant le Chevalier noir qui se prend le heaume à deux mains. Le Chevalier sans tune reproduit ses fameuses techniques de combat venues de la lointaine Asie. Pendant plus de deux heures, la scène se réitère 15 fois de suite, sans que le Chevalier sans tune ne prenne le temps de la moindre pause. Lors de sa dernière rotation, épuisé par tant d’efforts, le Chevalier sans tune tente de sauter par-dessus le fossé… Malheureusement, il échoue d’un bon mètre et tombe directement dans l’eau.  Ayant gaspillé toute son énergie et ne sachant nullement nager, notre héros va se noyer, il le sait ! Aussi, avant de couler à pic, le Chevalier sans tune lance à l’adresse du Chevalier noir :

« Argh ! Je perds cette bataille, mais pas la guerre ! N’aies crainte, Chevalier noir, tu n’en as pas fini avec le Chevalier sans tune… J’aurai ma revanche et quand je t’aurai vaincu, j’irai boire à ta… glouglouglou! ».

Sur ces mots, l’intrépide jeune homme coule à la verticale et disparaît à jamais dans l’eau stagnante, accompagné de quelques carpes qui n’en demandaient pas tant ! Ainsi se termine l’histoire peu commune, mais peu glorieuse, du Chevalier sans tune.